- L'artiste
Denis Pascal
Après ses études au CNSM de Paris dans la classe de Pierre Sancan, Denis Pascal reçoit, à l'unanimité, un premier prix de piano et de musique de chambre. Il accomplit ensuite le troisième cycle de perfectionnement auprès de Jacques Rouvier, Léon Fleisher et Gyorgy Sandor. Il est lauréat des concours internationaux de Lisbonne, du Concert Artist Guild de New-York et Zurich et se perfectionne ensuite auprès du pianiste hongrois Gyorgy Sebok à l'université d'Indiana à Bloomington, où il obtient l'Artist Diploma. Michel Béroff l'invite à venir enseigner auprès de lui au CNSM de Paris.
Denis Pascal se produit comme soliste et musicien de chambre, à l'étranger, notamment aux États-Unis (New-York, Washington, San Francisco), en Europe (Italie, Espagne), ainsi qu'à Paris au Théâtre des Champs-Élysées, Théâtre du Châtelet, Théâtre de la ville, salle Gaveau, Opéra Garnier (concerts diffusés par ARTE, Mezzo, TV5, retransmis par France-Musique et Radio Classique). On le retrouve dans de nombreux festivals internationaux, Fêtes Romantiques de Nohant, Festival Consonance Saint-Nazaire, Roque d'Anthéron, Piano aux Pyrénées, Heidelberg. Denis Pascal est également invité à se produire comme soliste avec les orchestres nationaux de Bordeaux, de Lyon, du Capitole de Toulouse, au Japon avec le New Japan Philharmonic, aux États-Unis avec le Classical Philharmonic et le Pacific Chamber Ensemble. Chambriste recherché, Denis Pascal a été un partenaire d'élection de Janos Starker et a réalisé l'ultime enregistrement d'Alain Marion (diapason d’or) consacré aux Sonates de Beethoven. Denis Pascal s'affirme de plus en plus aujourd’hui comme l'un des représentants du répertoire lisztien, de la musique impressionniste et post romantique (chez Polymnie : Debussy, POL 150 314 - Jacque-Dupont, POL 580 322). Son enregistrement de l'intégrale des Rhapsodies hongroises de Franz Liszt (POL 150 107) a été unanimement récompensé par la critique : Choc du Monde de la Musique, Recommandé par Classica, Prix de l'Association Française Franz Liszt. Denis Pascal a également été salué pour son enregistrement en première mondiale de l'œuvre pour piano de Joseph Marx.
- Le programme
Franz Liszt
Rhapsodies n°16, 17, 18, 5, 7
Maurice Ravel
“Gaspard de la nuit”
Ondine - Le gibet - Scarbo
Ernest Chausson
Dédicace et Sarabande
Claude Debussy
Images
Reflets dans l'eau
Hommage à Rameau
Mouvements
Cloches à travers les feuilles
la Lune descend sur le temple qui fut
Liszt se définissait lui-même comme le premier tzigane du royaume de Hongrie. Ses Rhapsodies ont été composées dans les années 1840 – 1850. Ce ne sont pas uniquement des morceaux de virtuosité, ce sont aussi des hommages à la liberté, celle de peuples aux traditions méconnues.
Gaspard de la nuit, de Ravel, est une pièce d’une virtuosité éblouissante. Trois morceaux la composent, inspirées par de courts poèmes en prose d’Aloysius Bertrand, d’inspiration très noire et qui ont marqué la littérature romantique, particulièrement fantastique. Nous avons jugé intéressant de joindre à ce Programme les textes dont s’est inspiré
Ravel ; le lecteur et l’auditeur pourront ainsi confronter leurs émotions.
Mais revenons à la musique de Ravel qui constitue le moment clé de notre concert. L’œuvre fut créée en 1909 et comporte trois mouvements : Ondine est une évocation du monde aquatique, faite d’allers et retours, de clapotis, dont Ravel accompagne par ses frémissements mélodiques la fluidité, déjà présente dans le texte de Bertrand. Dans Le gibet, ce sont des images sonores d’une autre nature qui nous sont offertes, martelées (cinquante-trois octaves de si bémol !), créant une sorte d’hallucination. Ne s’agit-il pas, en effet, dans le texte des émotions d’un pendu ? Scarbo, même s’il est moins sinistre, recourt néanmoins aux ressources du merveilleux, de l’étrange. C’est une vraie fantasmagorie qui nous emporte de son rythme frénétique.
Les Quelques danses, opus 26, d’Ernest Chausson, datent de 1896. Elles sont dédiées “À Mme Henriette de Bonnières”, épouse du romancier et critique du Figaro, Robert de Bonnières (1850-1905). Auguste Renoir avait fait le portrait de Mme de Bonnières en 1889.
Un demi-siècle après les Rhapsodies de Liszt, Debussy réinventait la musique pour piano avec ses Images, petits morceaux d’exaltation du silence, du détail infime auxquels il donne une résonance inoubliable.
Gaspard de la nuit
A. Bertrand raconte comment un soir, à Dijon, un inconnu lui remit un livre intitulé Gaspard de la nuit. Ce petit livre est composé de courts Poèmes en prose, genre littéraire dont Bertrand fut le précurseur et reconnu comme tel par Baudelaire. Voici les trois Poèmes qui ont inspiré Ravel, eux-mêmes inspirés à l’auteur par des gravures de Callot et Rembrandt évoquant le moyen-âge. Seul le piano, servi par un interprète de grand talent, pouvait nous faire entrevoir ces merveilles de correspondances et d’harmonie.
ONDINE
Je croyais entendre
Une vague harmonie enchanter mon sommeil,
Et près de moi s’épandre un murmure pareil
Aux chants entrecoupés d’une voix triste et tendre.
Écoute ! – Écoute ! – C’est moi, c’est Ondine qui frôle de ces gouttes d’eau les losanges sonores de ta fenêtre illuminée par les mornes rayons de la lune ; et voici, en robe de moire, la dame châtelaine qui contemple à son balcon la belle nuit étoilée et le beau lac endormi.
"Chaque flot est un ondin qui nage dans le courant, chaque courant est un sentier qui serpente vers mon palais, et mon palais est bâti fluide, au fond du lac, dans le triangle du feu, de la terre et de l’air."
SCARBO
Il regarda sous le lit, dans la cheminée, dans le bahut ; personne. Il ne put comprendre par où il s’était introduit, par où il s’était évadé.
Hoffmann
Oh ! que de fois je l’ai entendu et vu, Scarbo, lorsqu’à minuit la lune brille dans le ciel comme un écu d’argent sur une bannière d’azur semée d’abeilles d’or.
Que de fois j’ai entendu bourdonner son rire dans l’ombre de mon alcôve, et grincer son ongle sur la soie des courtines de son lit !
Que de fois je l’ai vu descendre du plancher, pirouetter sur un pied et rouler par la chambre comme le fuseau tombe de la quenouille d’une sorcière.
Le croyais-je alors évanoui ? le nain grandissant entre la lune et moi, comme le clocher d’une cathédrale gothique, un grelot d’or en branle à son bonnet pointu !
Mais bientôt son corps bleuissait, diaphane comme la cire d’une bougie, son visage blêmissait comme la cire d’un lumignon, - et soudain il s’éteignait.
« Écoute – Écoute ! – Mon père bat l’eau coassante d’une branche d’aulne verte, et mes sœurs caressent de leurs bras d’écume les fraîches îles d’herbes, de nénuphars et de glaïeuls, ou se moquent du saule caduc et barbu qui pêche à la ligne. »
Sa chanson murmurée, elle me supplie de recevoir son anneau à mon doigt, pour être l’époux d’une Ondine, et de visiter avec elle son palais, pour être le roi des lacs.
Et comme je lui répondais que j’aimais une mortelle, boudeuse et dépitée, elle pleura quelques larmes, poussa un éclat de rire, et s’évanouit en giboulées qui ruisselèrent blanches le long de mes vitraux bleus.
LE GIBET
Que vois-je remuer
autour de ce gibet ?
Faust
Ah ! ce que j’entends, serait-ce la bise nocturne qui glapit, ou le pendu qui pousse un soupir sur la fourche patibulaire ?
Serait-ce quelque grillon qui chante tapi dans la mousse et le lierre stérile dont par pitié se chausse le bois ?
Serait-ce quelque mouche en chasse sonnant du cor autour de ces oreilles sourdes à la fanfare des hallalis ?
Serait-ce quelque escargot qui cueille en son vol inégal un cheveu sanglant à son crâne chauve ?
Ou bien serait-ce quelque araignée qui brode une demi-aune de mousseline pour cravate à ce col étranglé ?
C’est la cloche qui tinte aux murs d’une ville, sous l’horizon, et la carcasse d’un pendu que rougit le soleil couchant.
- Le lieu
Salle Val de l'Isle, 12 rue de l'Isle à Troyes
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